A l'origine des médicaments

A l'origine des médicaments

Que cela soit occasionnel ou plus régulier, les médicaments font partie intégrante de nos vies. Gélules, comprimés, sirops, gels, crèmes, la liste est longue ! Mais avant d’arriver dans nos armoires à pharmacie, de nombreuses étapes sont nécessaires à leur conception. La première étant l’idée même de la molécule qui sera contenue dans chacun de ces médicaments. Retour sur une très longue histoire…




D’où viennent-elles, ces molécules ?

Au fil des temps, les traitements médicaux, leurs usages et leurs modes de préparation ont été rassemblés dans des recueils appelés pharmacopées. Pour comprendre leur origine, faisons un bon en arrière.

Les hommes préhistoriques de l’époque du néolithique, sont probablement les premiers à être partis à la recherche de substances capables de soulager leurs maux, en cherchant à les guérir. Les scientifiques pensent que la sédentarisation a joué un rôle important dans le développement de la médecine préhistorique car elle a pu entraîner l’émergence de nombreuses maladies. En effet, l’homme sédentaire vit plus proche des animaux, laissant une plus grande liberté aux microbes (bactéries, virus) de passer de l’animal à l’homme. Pour se soigner, ils se sont principalement tournés vers ce qu’ils avaient à disposition, à savoir les plantes. Ainsi, la phytothérapie, que l’on considère à l’heure actuelle comme une thérapie alternative, était probablement la thérapeutique de base des premiers hommes. L’utilisation des plantes, à cette époque, en tant que médicament reste cependant hypothétique car aucun écrit ne peut le certifier.


Des pharmacopées riches d’enseignements

Les premiers témoignages d’utilisation de diverses substances dans le but de se soigner remonte à 3500 av. J.-C. : il s’agit des tablettes sumériennes découvertes en 1948 dans les ruines de la ville de Nippur. Rédigées en écriture cunéiforme, elles sont d’une très grande précision. Elles recensent non seulement les substances utilisées à l’époque (plantes, lait, miel, écailles de tortue…) mais aussi la partie de la plante utilisée (graine, racine, …), leurs modes de préparation ainsi que les maux contre lesquels ces traitements vont agir. On peut dire que les tablettes de Nippur constituent la première pharmacopée au monde.

Tablette sumérienne cunéiforme (https://www.ulg.ac.be/)


Dans l’antiquité, les Egyptiens ont établi leur pharmacopée sur du papyrus. Plusieurs séries couvrant les XVIIe et XVIIIe dynasties (entre 1634 et 1292 av. J.-C.) nous sont parvenues. On n’y recense pas moins de 1740 remèdes ! Les Egyptiens ont élargi l’origine des produits utilisés puisqu’ils utilisent des minéraux mais aussi certains produits d’origine humaine.

La civilisation grecque antique a donné naissance à celui qui est considéré comme le père de la médecine : Hippocrate (460-377 av. J.-C.). Par sa nouvelle théorie d’observation des malades, il révolutionne la médecine et par la même occasion, les traitements utilisés. Hippocrate vise l’équilibre du corps et cerne le concept de dose des traitements utilisés, précisé par la suite par Paracelse.

Buste d'Hippocrate par Pierre-Paul Rubens, 1638 (https://fr.wikipedia.org/wiki/Hippocrate)


Un peu plus tard, vécut le père de la pharmacie, Claude Galien (129 ou 131 - 201 ou 216). Il simplifia les écrits d’Hippocrate pour les rendre plus accessibles et base son exercice sur l’association de la théorie et de l’expérimentation. Pour lui, prises de façon isolée, la théorie comme l’expérimentation ne peuvent aboutir à quelque chose de bon.

Certes, la médecine et les traitements évoluent et progressent mais il existe une certaine part d’inefficacité… Ainsi, au Moyen Âge, en Europe, apparaissent de nombreux courants de sorcellerie en parallèle de la médecine traditionnelle. Les médicaments sont le plus souvent basés sur des plantes et des produits d’origine animale.



Des découvertes décisives

A la Renaissance, la découverte des Amériques amène un nouveau souffle avec la découverte de plantes très efficaces contre certaines maladies. On peut notamment citer la quinine alors utilisée dans le traitement de fièvres graves ainsi que les curares qui seront utilisés plus tard comme anesthésiques du fait de leurs propriétés paralysantes.

La révolution du médicament date des XVIIIe et XIXe siècles. On ne cherche plus à traiter une maladie avec un élément dans sa totalité mais on cherche à isoler ce qu’on appellera le principe actif, c’est-à-dire la molécule qui a un effet dans un contexte précis lorsque la plante ou la substance minérale ou animale sont utilisées. Sont ainsi isolées la morphine du pavot, la salicyline de l’écorce de saule ou encore la cocaïne de la coca. Grâce à l’isolation des principes actifs par diverses méthodes (infusion, décoction, macération…), on gagne en efficacité par une action plus ciblée.

Rapidement après ces découvertes, les chimistes ont cherché à synthétiser entièrement ces molécules afin de les améliorer et les optimiser. Un des meilleurs exemples est celui de l’acide acétylsalicylique qui n’est autre que l’aspirine et qui est un dérivé synthétisé de la salicyline précédemment extraite et isolée.


Formules de la salicine et de son dérivé l'acide acétylsalicylique (http://www.chimix.net/an10/bac10/sud90.htm)


Le XXe siècle est l’ère de la chimie pharmaceutique. La chimie organique bat son plein, les connaissances croissent de jour en jour. Alors on synthétise à la chaîne. De plus en plus de molécules et leurs dérivés voient le jour formant ainsi des familles de molécules qui comprennent petit à petit plusieurs générations. En parallèle des progrès de la médecine et de la chirurgie, ce sont de véritables avancées pour la santé humaine.

 La pharmacie de synthèse s’essoufflant peu à peu, certaines maladies restant toujours mortelles et sans traitement efficace, il faut trouver d’autres sources pour de nouveaux médicaments. C’est alors que dans les années 1920, émerge l’idée d’utiliser des protéines animales pour supplémenter l’homme dans des pathologies comme le diabète avec l’insuline de porc ou de bœuf. Mais il y a un problème de rendement et de logistique. Il faut énormément d’animaux pour parvenir à obtenir suffisamment d’insuline pour tous les malades. Les chercheurs, dans les années 1970, trouvent un moyen de fabriquer ces protéines humaines par méthode recombinante, c’est-à-dire fabriquées dans un autre organisme, le plus souvent des bactéries. Ces techniques ont été étendues pour mettre au point d’autres traitements comme ceux à base d’hormone de croissance.


Représentation schématique du processus de production d'insuline recombinante (http://genet.univ-tours.fr/gen002300/Pour%20en%20savoir%20plus/histoire%20de%20l%20insuline.html )


Vers une nouvelle ère

Les recherches sur les thérapies par anticorps sont elles aussi en plein essor à partir des 1970 et l’arsenal thérapeutique à base d’anticorps est de plus en plus développé aujourd’hui, notamment pour traiter des cancers, des maladies auto-immunes ou encore pour prévenir les rejets de greffe.

Les plus récentes avancées sont celles dont on parle beaucoup ces derniers temps : les vaccins à base d’ARN messager. Même si les vaccins ne sont pas à proprement parlé des médicaments puisqu’ils ne visent pas la guérison mais la prévention d’une maladie, l’objectif cette fois est de faire produire au corps humain une protéine contre laquelle le système immunitaire pourra réagir afin de constituer une mémoire immunitaire.

Ainsi, l’homme est passé d’une médecine par les plantes et autres substances animales à un traitement des maladies par des molécules extraites de ces plantes puis par des dérivés synthétisés avant d’être aussi traités directement par certains éléments de l’organisme humain produit grâce aux biotechnologies dans le but de supplémenter en une protéine ou des anticorps spécifiques.

Le futur du médicament repose aujourd’hui sur des thérapies cellulaires et des thérapies géniques. Grâce aux connaissances grandissantes des chercheurs sur les mécanismes moléculaires et cellulaires du corps humain, les médicaments vont probablement vivre de profondes transformations et ont un bel avenir devant eux.




Sources :

1.     Landry Yves, Initiation à la connaissance du médicament, Ediscience, 2012

2.     Philippe Jaussaud. Les pharmacopées. 2012. ffhalshs-00846866

3.     Revue d'histoire de la pharmacie, 52e année, N. 181-182, 1964

4.     http://djqmfrancois.free.fr/AuP1complet/wp-content/uploads/1.-Histoire-du-m%C3%A9dicament.pdf

5.     https://www.lequotidiendupharmacien.fr/archives/claude-galien-pere-de-la-pharmacie


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2 août 2021
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