L’informatique quantique, l’essentiel en 5 minutes

L’informatique quantique, l’essentiel en 5 minutes

Superposition d’état, univers parallèles, effet tunnel, téléportation, intrication, médecine quantique ou même le prochain Marvel, on entend tout aujourd’hui… et souvent n’importe quoi sur ce qu’est le « quantique ». Éclaircissements…


Démêler le vrai du faux dans le domaine quantique est rarement aisé, d’autant que cet univers révolutionnaire de la physique base son formalisme sur des principes peu intuitifs… voire carrément abstraits. Et quand on ajoute à cela l’informatique et une course à celui qui aura la machine la plus performante, on obtient tous les mois des articles expliquant que [insérer nom entreprise] a battu le record de [insérer nom entreprise concurrente] dans le domaine de [insérer notion vague en info quantique]. Difficile donc de s’y retrouver, et de comprendre simplement et rapidement comment ça marche ! Pour y voir un peu plus clair, voici l’essentiel à savoir sur l’informatique quantique. Et ce, sans équations complexes…



Qu’est-ce que la combo informatique + quantique ? 


L’informatique quantique est un sous-domaine de l’informatique, mettant à profit les propriétés de la physique quantique afin de réaliser des opérations logiques. Autrement dit, l’idée fondamentale est de reproduire le fonctionnement d’un calculateur classique, mais dopé à la physique quantique. Par analogie à l’informatique classique et ses « bits », on retrouve les « qubits » (pour quantum bits), et par analogie aux portes « logiques », on retrouve les portes « quantiques ». C’est dans ces composants de base qu’interviennent deux propriétés fondatrices de la physique quantique : la superposition d’état et l’intrication.



Aucun chat n’a été maltraité, mais…


La première fois que l’on vous a parlé de physique quantique, il est fort probable que le fameux chat de Schrödinger et sa macabre condition aient été de la partie. Si l’on peut apprécier cet exemple, il peut facilement induire en erreur. Pour rappeler rapidement l’expérience, un chat se trouve dans une boîte dans laquelle peut se répandre un gaz empoisonné. La libération de ce gaz est conditionnée à l’état d’un atome qui a 50 % de chances de se désintégrer durant les 10 prochaines minutes. Dès lors que l’atome se désintègre, le gaz est libéré et adieu le chat. Tant que l’on n’ouvre pas la boîte, de notre point de vue, le chat est à la fois vivant ou mort, car on ignore si l’atome s’est désintégré. Le problème avec cette expérience, c’est qu’elle laisse intuitivement croire qu’en ouvrant la boîte, on ne fait que constater l’état du chat, alors qu’en réalité, on est bien plus responsable que cela.


Le solution, c’est le choix


Celui qui a démontré que vous étiez le responsable du sort du chat, c’est Alain Aspect, (très) récemment récompensé d’un prix Nobel pour son expérience éponyme réalisée au début des années 1980. Ce qu’il a démontré, c’est qu’en physique quantique, quand il existait une incertitude sur l’état d’un système, la détermination dudit état se réalisait au moment de la mesure, et non avant (déterminé par une variable cachée, comme l’expérience du chat de Schrödinger le laisse croire).


La superposition d’état, c’est donc ce laps de temps durant lequel l’ensemble des scénarios possibles coexistent, avant que la mesure « choisisse », avec une certaine probabilité, une des issues possibles. Autrement dit, tant qu’on ne sait pas, on dit que le chat est dans une superposition d’état mort et vivant, et que c’est la mesure qui va déterminer l’état du chat.  Cette proposition implique également que lorsque la mesure est effectuée, il n’est plus possible d’interagir avec le système. On dit alors que la superposition s’effondre, et l’on obtient l’un des états possibles, ayant chacun une certaine probabilité d’être mesuré.


D’un point de vue plus abstrait, on peut imaginer que deux temporalités coexistent. L’une où l’atome s’est désintégré, et l’autre où l’atome est intact. La mesure revient donc à choisir une branche temporelle au détriment d’une autre. Dans notre exemple, plus le temps passe, et plus les temporalités dans lesquelles le chat est mort sont probables.




Et les qubits dans tout ça…


Pour faire simple, un qubit, c’est la version généralisée du chat de Schrödinger !  Comme pour un bit classique, un qubit est un système à deux états : 0 ou 1. La différence est que, pendant le calcul, le qubit est dans une superposition de l’état 0 et de l’état 1. Chacun de ces deux états a une certaine probabilité d’être mesuré, et la somme de ces deux probabilités vaut 1 (on mesure forcément l’un des deux).

Si l’on considère maintenant N qubits, chacun dans un état de superposition, on peut encoder 2^N (2 x 2 x 2… N fois) séquences binaires différentes simultanément, là où N bits n’encoderaient qu’une des séquences possibles parmi les 2^N. Pas mal, non ?

Dans l’idée, c’est comme comparer une bibliothèque à une liseuse électronique. Au lieu des milliers de livres contenant chacun des milliers de pages, on a un écran de la taille d’une page, pouvant afficher n’importe quelle combinaison de caractères (et donc n’importe quelle page de n’importe quel livre). En bref, plus le problème est complexe, et plus c’est intéressant de le traiter avec le quantique, car il faudra bien moins de variables pour encoder et traiter l’ensemble des états.


Comment faire 1+1 avec un ordinateur quantique ?


Maintenant qu’on a nos petits cailloux magiques pour calculer, il s’agirait de les faire interagir entre eux. Si l’on prend deux qubits en état de superposition, ils sont intriqués si l’état de l’un dépend de l’état de l’autre lors de la mesure. Dans un ordinateur quantique, ce sont les portes quantiques (à plusieurs qubits) qui permettent d’intriquer les qubits entre eux, et de réaliser des opérations complexes.



La programmation sur un ordinateur quantique s’effectue donc en définissant un ensemble de portes, appelé circuit quantique. Ce circuit a pour objectif de favoriser la mesure de certaines séquences binaires qui répondent (si on a bien travaillé) au problème posé. En exécutant de nombreuses fois le circuit, et en notant l’état mesuré à chaque itération, il suffit de trouver les séquences le plus souvent mesurées, et de les considérer comme solution de notre problème. Dans les faits, c’est comme si l’on était en face d’un dé, et qu’on souhaitait savoir s’il était pipé. Un unique lancer ne nous donnerait aucune indication, mais obtenir 500 fois un 6 en 1000 lancers permettrai de conclure sur la nature du dé.


Aux portes de la révolution


Vous avez dorénavant les bases du calcul quantique, et vous devinez déjà le potentiel que cette technologie renferme. Dans un prochain article, j’exposerai plus en détails les capacités actuelles et les limites de cette technologie, ainsi que les principales pistes d’amélioration qui pourraient faire du calcul quantique l’informatique de demain. Un vrai bouleversement en perspective.



Sources : 


  1. Experience d’Aspect : http://feynman.phy.ulaval.ca/marleau/pp/03epr/epr_3/epr_3.html
  2. Le qubit, en tant qu’objet mathématique : https://learn.microsoft.com/fr-fr/azure/quantum/concepts-the-qubit
  3. La superposition d’états : https://www.youtube.com/watch?v=Va-WLeObSSo 
  4. L’intrication quantique : https://www.youtube.com/watch?v=5R6k2mEacZo


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