Ce bel héritage de nos mères
La vie sur notre Terre existe depuis maintenant environ 4 milliards d’années, et 2 milliards que des cellules uniques sans noyaux ont fait leur apparition. On y retrouvait des archées et des bactéries, deux types de microorganismes proches mais à la composition différente.
Certaines bactéries ont
alors, au cours de l’évolution, envahi les archées qui, elles, en ont profité. Ces bactéries ont évolué en
mitochondries au sein de nos cellules. Cette association a permis de
construire notre « noyau » cellulaire, là où sera stocké notre
précieux ADN.
Les eucaryotes contiennent des mitochondries bactériennes avec de l’ADN bactérien. Nous avons donc dans nos cellules de l’ADN de bactérie.
Et seules les mères nous transmettent ces mitochondries. Pour mieux comprendre le fonctionnement, il faut se pencher de plus près sur notre reproduction que l’on dit sexuée. Pour cela, nous avons besoin d’un homme et d’une femme afin que tout marche correctement de façon naturelle.
Nous transmettons, lors de notre reproduction, nos gènes mais également nos mitochondries. Bien que les parents mélangent leurs gènes, ils évitent de mélanger leurs mitochondries. Chez nous et la majorité des êtres vivants, c’est la mère qui transmet ce précieux colocataire de nos cellules.
Mais à quoi servent ces mitochondries
et où se situent-elles ? Nos
mitochondries se trouvent dans nos cellules au
niveau du cytoplasme, le contenu
entourant les noyaux. Elles
permettent de produire l’ATP (adénosine triphosphate), c’est-à-dire
l’énergie nécessaire au fonctionnement de nos cellules. Elles régissent également l’homéostasie, soit
l’équilibre de notre organisme et ses fonctions comme la température, réagissent
aux facteurs de stress et gèrent les déchets des cellules. Elles font aussi partie de
groupes qui s’occupent de la mort programmée de nos
cellules. Mais attention ! Dans nos organismes rien ne travaille seul. Tout
le monde collabore, la mitochondrie n’agit jamais en solitaire.
Comment est produit cette
ATP et dans quel cas concret peut-elle servir ? La majorité de cette
énergie provient de ce que l’on appelle la métabolisation du glucose et des
acides gras par nos mitchondries. Le but est de transformer le glucose absorbé
lors de notre alimentation à l’aide d’enzymes. Les enzymes sont des molécules
permettant d’accélérer les réactions. Cette opération est rendue possible par
un mécanisme que l’on appelle phosphorylation oxydative.
Schéma de la phosphorylation oxydative
L’énergie ainsi produite permet d’alimenter nos cellules, mais pas uniquement. On y retrouve un lien avec la production de la chaleur des mitochondries et par conséquent notre homéostasie. En effet, plus la production de chaleur est élevée, plus la production d’ATP est faible. Ce caractère peut être héritable chez certaines populations d’après l’étude de Ruiz-Pesini et al. 2000. Les habitants des climats froids sont ainsi plus susceptibles d’avoir hérité de mitochondries qui produisent relativement moins d’ATP et donc plus de chaleur.
Autre fait intéressant,
nous avons vu précédemment que seules les femmes au sein de notre espèce pouvaient
transmettre les mitochondries. En effet, nous retrouvons aussi de l’ATP au sein
des spermatozoïdes, donc des mitochondries. Leur fonction étant de fournir en
énergie sur un long sprint ces nageurs pour atteindre la ligne d’arrivée, elles
se verront éliminées une fois que le gagnant aura passé la barrière de l’ovule.
Seules les mitochondries apportées par la mère sont ainsi prises en compte. Et
si ces mitochondries masculines fonctionnent mal, que se passe-t-il ? Eh
bien les petits nageurs ont des ratés, car il n’y aura plus assez d’ATP et le taux
de fertilité chez le mâle se verra diminuer.
Schéma de spermatozoïdes en mouvement lors de la fécondation
Ces mitochondries ont des effets aux différents stades de notre évolution, mais également sur tout notre corps.
Nous avons parlé de leurs réactions face aux facteurs de stress. Les causes peuvent être multiples comme la privation de nutriments, qui entraîne des dommages sur les cellules et l’ADN, et provoque ainsi une réduction de l’espérance de vie.
Enfin pour la gestion des
« déchets », nous pouvons comparer nos mitochondries à des usines de
recyclage. Si un dysfonctionnement survient suite, par exemple, à une tumeur, une
accumulation de ces « déchets » autour de nos cellules nuisent à leur
environnement de vie, mais aussi à leur bonne communication avec ses voisines.
Ainsi, nous hébergeons de l’ADN bactérien dans nos propres cellules, résultat d’une symbiose évolutive de plusieurs espèces il y a des milliards d’années.
Notre santé dépend de nos mitochondries et inversement. Il est donc important de prendre soin de ces habitants de nos cellules afin que notre corps fonctionne correctement.
Sources
1. Bertram R et al. A simplified model for mitochondrial ATP production. Journal of Theoretical Biology. 2006.
2. Halina Cichoz-Lach and Agata Michalak. Oxidative stress as a crucial factor in liver diseases. World J Gastroenterol. 2014.
3. Focusing on mitochondrial form and function. Nature Cell Biology. 20, 735. 2018
4. Imen Belhadj Slimen et al. Reactive oxygen species, heat stress and oxidative-induced mitochondrial damage. International Journal of Hyperthermia. Vol 30. 2014.
5. Jessica B. Spinelli and Marcia C. Haigis. The Multifaceted Contributions of Mitochondria to Cellular Metabolism. Nature Cell Biology. 2018
6. Jonathan R. Friedman and Jodi Nunnari. Mitochondrial form and function. Nature. 2014.
7. Naoto Konari et al. Mitochondria transfer from mesenchymal stem cells structurally and functionally repairs renal proximal tubular epithelial cells in diabetic nephropathy in vivo. Scientific Reports. 2019.
8. Peter Kramer and Paola Bressan. Our (Mother’s) Mitochondria and our mind. Perspectives on psychological science. 2018.
9. Tim J. Schulz et al. Glucose Restriction Extends Caenorhabditis elegans Life Span by Inducing Mitochondrial Respiration and Increasing Oxidative StressCell metabolism. 2007. 280-293
10. Veronica Eisner, Martin Picard and Gyorgy Hajnoczky. Mitochondrial dynamics in adaptive and maladaptive cellular stress responses. Nature Cell Biology. 2018.
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