Ces marques que l’on porte à vie

Ces marques que l’on porte à vie

La peau est un organe qui nous protège du monde extérieur. Sur 1 cm3, on retrouve 3 vaisseaux sanguins, 12 nerfs, 100 glandes qui nous permettent de suer et émettre des phéromones, 10 poils avec 15 glandes qui leur sont associées et 3 millions de cellules.


Schéma des strates de la peau

 

Au cours de sa vie, notre peau subit différents types d’agressions. Blessures, agressions bactériennes, réactions liées aux médicaments, aux maladies telles que le psoriasis ou encore un impact neuropsychologique…

Dans le cas d’une blessure, des organismes étrangers et dangereux pour notre santé peuvent s’introduire (bactéries, virus). La peau d’un individu en bonne santé guérit seule. Néanmoins, si la blessure est large et profonde chez un mammifère adulte, comme nous par exemple, cela peut engendrer une cicatrice.

La recherche sur les technologies permettant une meilleure cicatrisation, voire une cicatrisation sans marque, est très active. Ce domaine n’a pas qu’une visée esthétique, même si celle-ci a un impact certain sur l’état psychique à long terme. En effet, une cicatrice visible, notamment sur le visage, peut aboutir à une stigmatisation sociale, une baisse de l’estime de soi, une perturbation des activités du quotidien, mais aussi une anxiété et/ou une dépression. La cicatrice peut également être douloureuse physiquement. La peau est alors surélevée et tendue dans cette zone, avec une couleur différente.

 

Comment se forme une cicatrice ?

La cicatrisation est bien décrite et connue du point de vue des molécules et des cellules. Elle se présente en 3 étapes : l’inflammation, la prolifération et le remodelage.



Schéma des 3 grandes étapes de la cicatrisation

Dans un premier temps, une blessure assez profonde va couper et créer une brèche dans notre peau. Afin d’éviter que l’on se vide immédiatement de notre sang, nos vaisseaux vont se contracter afin de réduire son passage et son évacuation hors de notre corps. C’est la vasoconstriction. Les plaquettes, qui jusqu’ici circulaient tranquillement au milieu de nos globules rouges, vont être appelés avec une protéine, la fibrine, à colmater la brèche. Les plaquettes jouent le rôle de la colle et les fibrines, de fibre de verre pour consolider. Cette étape correspond à l’inflammation.

Ce bouchon reste tout de même fragile. Les vaisseaux sanguins vont alors se « réouvrir » afin de permettre l’acheminement des renforts et ainsi rendre possible la cicatrisation. C’est la vasodilatation. La coagulation peut alors commencer. Il s’agit de l’étape où le bouchon est bien étanche, les saignements se sont arrêtés et cela grâce à différents types de cellules et molécules. C’est alors au tour du nettoyage : les débris des cellules, qui ont été détruites/ou endommagées, vont être mangés tout comme les virus et bactéries qui en avaient profité pour essayer de s’introduire.

S’ensuit la phase de prolifération qui a lieu 2 à 10 jours après l’incident. Une nouvelle peau commence à se construire. Il est important de distinguer un type de cellule qui a un rôle clé durant cette étape, les fibroblastes. Ce sont eux qui vont produire une protéine appelée collagène. Cette protéine est très utilisée, notamment dans les produits cosmétiques ou même en chirurgie esthétique. Et pour cause, rien que dans notre cas ici, elle occupe une place de choix. Le collagène représente 80 à 90 % de la composition d’une cicatrice (son impact dans le corps ne se limitant pas qu’à cela). A cette étape, la surface de la peau est très contractée. Avec le temps, la cicatrice devient moins épaisse et ferme, moins rouge également, c’est le remodelage. Il peut durer quelques mois comme plus d’un an.

 

La cicatrisation ne se passe pas toujours comme prévu

Le contrôle de sa formation est extrêmement important pour des patients atteints d’hypertrophie, de chéloïdes, pour les personnes âgées ou les diabétiques, pour qui l’issue peut être fatale.



Photographie d’une cicatrice hypertophique (A) et d’une cicatrise avec chéloïdes (B) (Source : doi: 10.1089/wound.2016.0696)

 

Les cicatrices hypertrophiques sont des cicatrices restant dans la zone de blessure. Elles peuvent diminuer avec le temps. Elles sont néanmoins grandes et douloureuses et contiennent du collagène organisé. Les chéloïdes, quant à eux, sont des cicatrices excessives qui se propagent en dehors de la zone de blessure. Elles sont grandes, douloureuses et saillantes avec un collagène qui, lui, est désorganisé. Concernant les personnes âgées, on retrouve une baisse d’efficacité des acteurs de la cicatrisation, ce qui peut provoquer des infections ou des maladies.

 

De nouvelles technologies émergent

Afin de pallier ces problèmes, différentes solutions sont misent en place. Tout d’abord des éléments de prévention avec le soulagement de la tension dans la peau, l’hydratation des cicatrices, le bandage et des vêtements de compression.

Concernant les technologies à venir, il a été observé chez les fœtus (jusqu’à 24 semaines) et certains animaux (poisson, grenouille, salamandre…) qu’une guérison sans cicatrice était possible. Cela est dû à la différence de quantité d’acteurs de la cicatrisation.

Des travaux sont en cours avec les cellules souches, mais aussi avec la peau de poisson. Celle-ci peut être, dans le futur, une bonne alternative à la greffe de peau. En effet, une greffe a toujours un risque d’être rejetée même 25 ans après. La peau de poisson, elle, atténue ce risque. Il y a peu d’éventualité de contracter une infection ou une maladie. Elle est également rentable et naturelle. Pour être greffée toutes ses cellules doivent être retirées. Des pansements de peau de poisson sont également possibles. Enfin, l’arrivée de l’impression 3D prenant de plus en plus de place en biologie, l’impression d’organe et de peau sont en plein essor.

Plusieurs outils en développement sont prometteurs et permettront peut-être un jour de ne plus avoir de cicatrice. Ce n’est pas qu’un caprice esthétique, pour certains il peut s’agir d’une vraie souffrance physique et/ou mentale.

 

Sources:

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2.   Barroux, G. Lorsque Tremblay et Réaumur parlaient de « régénération ». Med Sci (Paris) 19, 761–762 (2003).

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4.   Davidson, J. M. Can Scarring Be Turned Off? The American Journal of Pathology 176, 1588–1591 (2010).

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9.   Marshall, C. D. et al. Cutaneous Scarring: Basic Science, Current Treatments, and Future Directions. Adv Wound Care (New Rochelle) 7, 29–45 (2018).

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11.Ogawa, R. Recent Advances in Scar Biology. Int J Mol Sci 19, (2018).

12.Su, C. W., Alizadeh, K., Boddie, A. & Lee, R. C. The Problem Scar. Clinics in Plastic Surgery 25, 451–465 (1998).


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6 janvier 2021
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