“Nous espérons semer des graines qui germeront en actions concrètes”
Entretien avec Véra Frossard, organisatrice du Festival Lumexplore, qui se tient cette semaine, du 25 au 29 septembre, à La Ciotat. Cette 9e édition est bien plus qu'un simple festival cinématographique : c’est un véritable carrefour d'exploration et de valorisation scientifique. Il se distingue par son engagement envers les jeunes et sa volonté de transmettre des valeurs fortes à travers une multitude d'activités annexes.
Véra Frossard, organisatrice du festival Lumexplore, également productrice de films et membre de la Société des explorateurs français, incarne parfaitement l'esprit de cette association fondée en 1937. Celle-ci a pour mission de regrouper les grands voyageurs qui, par leurs recherches et explorations, enrichissent nos connaissances des régions les plus inaccessibles. Que ce soit en approchant des tribus méconnues, en conquérant des cimes inviolées, en empruntant des routes maritimes extrêmes, ou en explorant les profondeurs souterraines, ces explorateurs nous révèlent les faces cachées de notre planète.
Cortex-sciences : Le Festival Lumexplore existe depuis neuf ans. Comment a-t-il évolué au fil des années ?
Véra Frossard : Effectivement, il évolue chaque année. Nous gagnons en ampleur à chaque édition. L'année dernière, nous avons accueilli 6 500 visiteurs, alors que nous avions commencé avec seulement 1 000. C’était un événement très modeste à ses débuts. Chaque année, nous ajoutons de nouvelles animations, de nouveaux stands, et nous accueillons de plus en plus d'associations locales, de La Ciotat, de Marseille, de Toulon, ou d'Aix-en-Provence. Cette année, par exemple, nous avons créé un “Village Lumexplore” avec de nombreuses animations gratuites, des visites de bateaux, des expositions, des débats et des conférences. Nous essayons de toucher un public toujours plus large, pour les émerveiller devant la beauté de notre planète à travers des films aux images magnifiques, tout en leur apportant des connaissances grâce aux nombreuses expéditions scientifiques présentées.
Cortex-sciences : Vous avez mentionné l'importance de l'exploration dans vos films. Pourquoi est-ce encore crucial aujourd'hui, alors que certains pensent que nous avons déjà tout découvert sur Terre ?
Véra Frossard : Il est vrai que la surface terrestre est en grande partie explorée, mais il reste énormément à découvrir sous la mer, sous la terre, et dans l'espace. Nous en sommes encore aux prémices de l'exploration dans ces domaines. L'exploration est dans la nature humaine, et elle est loin d'être terminée. Les avancées technologiques nous permettent de repousser toujours plus loin les limites de nos connaissances.
Cortex-sciences : Le festival comprend également un volet littéraire. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Véra Frossard : Les membres de la Société des explorateurs français, ainsi que d'autres auteurs, participent en présentant leurs ouvrages. Des personnalités comme Sylvain Tesson, membre de la Société, écrivent des livres magnifiques qui remportent souvent des prix. Chaque année, nous organisons des séances de dédicaces, ce qui est un volet important du festival.
Cortex-sciences : Comment choisissez-vous les thématiques des films présentés chaque année ?
Véra Frossard : Nous lançons des appels à films auprès des sociétés de production avec lesquelles nous collaborons depuis neuf ans. Nous recevons des propositions de réalisateurs, et, de mon côté, je sélectionne également des documentaires diffusés sur des chaînes comme Arte ou La Cinq, parfois à des heures tardives. Nous choisissons les films les plus récents et pertinents parmi ceux proposés, en fonction des domaines d'intérêt du festival.
Cortex-sciences : Pouvez-vous nous parler des films en compétition cette année ?
Véra Frossard : Cette année, nous consacrons une journée entière à la mer, le mercredi. Nous y présentons des films sur l'océan, la Méditerranée, et la zone Pélagos, abordant à la fois les problématiques et les solutions envisagées. Nous avons également des films sur l'espace, qui sont particulièrement captivants. L'un d'eux, intitulé Chasseurs d'astéroïdes, traite des risques que ces corps célestes posent pour notre planète. Comme chaque année, nous avons aussi des films sur les animaux, les glaciers et l'archéologie. C’est très varié, il y en a pour tous les goûts.
Cortex-sciences : En dehors de la compétition de films, quelles sont les autres activités proposées par le festival ?
Véra Frossard : En plus des films, nous avons de nombreuses animations gratuites, notamment des stands interactifs. Par exemple, un stand propose une immersion sous-marine en réalité virtuelle, où les jeunes peuvent plonger virtuellement sous la mer. Le Parc national des Calanques, l'un de nos partenaires, présentera également des animations en 3D. Cette année, nous accueillons 16 associations locales, chacune proposant des activités ludiques pour les jeunes. Nous avons aussi la visite du bateau de Patrick Dixon, qui fait partie d'une équipe dédiée à la recherche de solutions contre les microplastiques dans les océanss
Cortex-sciences : Vous mettez un fort accent sur l'implication des jeunes. Avez-vous constaté des impacts concrets de vos initiatives sur leur engagement environnement ?
Véra Frossard : Oui, absolument. Les jeunes en parlent à leurs parents, contribuant ainsi à leur éducation environnementale. Ils prennent également des initiatives, comme le nettoyage des plages. Ils sont très conscients des problèmes actuels, et nous voulons leur montrer qu'il y a des solutions. Nous espérons semer des graines qui germeront en actions concrètes.
Cortex-sciences : Le festival a-t-il un rôle à jouer dans le changement des comportements face aux défis environnementaux ?
Véra Frossard : À notre niveau, oui, je pense que nous jouons un rôle important. Notre public est certes limité, mais nous espérons inspirer des idées et des initiatives, notamment chez les jeunes. Cette année, nous avons même des films qui viennent du monde entier, grâce à l'élargissement de notre réseau aux écoles françaises à l'étranger.
Cortex-sciences : Quels sont vos espoirs et ambitions pour l'avenir du festival, alors qu'il fête ses neuf ans cette année ?
Véra Frossard : L'année prochaine, ce sera notre dixième anniversaire, et nous avons pour ambition d’organiser un festival encore plus abouti, avec plus de participants et d'activités pour le public. Nous avons déjà commencé à y travailler. J'espère que ce sera une édition mémorable qui continuera de faire rayonner La Ciotat, notre partenaire depuis les débuts. Je tiens à ajouter que cette année nous avons un invité, Alain Gachet, un physicien français, qui sera présent le mercredi soir. Il fait partie du cercle très restreint des bienfaiteurs de l'humanité, ayant sauvé des millions de vies grâce à son invention : un radar couplé à un satellite de la NASA, capable de détecter des nappes phréatiques profondes. Cet outil a permis de trouver de l'eau rapidement dans des zones de catastrophe humanitaire, alimentant ainsi des milliers de réfugiés. Nous sommes très honorés de l'accueillir au festival. Nous projetterons également un film qui lui est dédié, Les Éclaireurs de l'eau, diffusé initialement sur Arte, et il partagera son parcours avec nous après la projection. C'est un moment fort que nous attendons avec impatience. Antoine de Maximy sera avec nous comme chaque année. Il est très populaire et c'est toujours un plaisir de l'accueillir. Cette année, il présentera un film réalisé avec Jeanne de Mascolo sur Alexandra David-Néel, un film qui a été primé. Avant de devenir célèbre pour ses documentaires J’irai dormir chez vous, il réalisait des films d'exploration scientifique, ce qui justifie pleinement sa présence régulière à notre festival.
Le festival se déroulera du 25 au 29 septembre 2024 à La Ciotat. Toutes les informations sont disponibles sur notre site internet lumexplore.fr. Les programmes sont déjà disponibles dans les cinémas et au théâtre, et il est possible de réserver en ligne ou directement sur place.
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